Depuis la signature de l’Armistice de Panmunjom en 1953, une zone démilitarisée entoure la frontière séparant la Corée du Sud et la Corée du Nord. La bande de terre d’environ 4 kilomètres de large n’a de « démilitarisée » que son nom : elle est minée de toute part et activement surveillée par des milliers de soldats. Le franchissement de la frontière inter-coréenne est actuellement impossible.
Au cœur de la DMZ, la Joint Security Area est un site créé pour permettre aux deux belligérants de se rencontrer et de dialoguer. Connue à travers les images de ses baraquements bleus à cheval sur la frontière, la JSA était au centre de l’actualité en 2018 avec la rencontre entre le Dirigeant suprême de la République populaire démocratique de Corée Kim Jong-un et le Président de la République de Corée Moon Jae-in puis entre le leader nord-coréen et le Président des États-Unis Donald Trump en 2019.
Au Nord comme au Sud, différents points d’intérêts de la DMZ peuvent être visités dont la Joint Security Area. Dans cet article, je vous présente l’excursion que j’ai effectuée côté Sud en septembre 2019.
Comment se rendre à la DMZ et à la JSA ?
La Joint Security Area n’est pas accessible librement. Il est obligatoire :
- de passer par l’une des agences de voyages agréées par la force de commandement de la JSA
- de réserver 4 jours au moins à l’avance car la liste des visiteurs doit être soumise à l’administration de la JSA
- d’emporter son passeport.
Les règles ont été assouplies fin 2018, il n’y a désormais plus de restrictions quant à la nationalité des participants.
Les agences de Séoul proposent au départ de la capitale sud-coréenne un circuit combiné DMZ + JSA d’une journée. J’ai opté pour Koridoor Tours qui offrait le meilleur tarif : 96600 KRW par personne, hors repas.
Le rendez-vous est fixé à 07h30 dans leurs bureaux (situés moins de 5 minutes à pieds de la station de métro Namyeong sur la ligne n°1) : signature d’une feuille de présence et d’une décharge de responsabilité, remise d’un badge et désignation d’un autocar.
Départ effectif de notre petit groupe d’une vingtaine de personnes autour de 08h15, accompagné par une guide de l’agence.
Une journée à la DMZ inter-coréenne et à la Joint Security Area
Gare de Dorasan
Après une petite heure de route et un checkpoint, premier arrêt à la gare ferroviaire de Dorasan située en bordure de la DMZ.
La ligne qui traverse la station permettrait de relier Séoul à Pyongyang, la capitale du Nord. Et par-delà connecter la péninsule coréenne au reste du monde via le réseau trans eurasien.
Des trains de passagers et de fret ont circulé entre Dorasan et Kaesong, zone industrielle nord-coréenne à proximité de la ligne de démarcation, jusqu’en 2016. Le service est actuellement suspendu.
Il est possible d’accéder aux quais, au bout desquels se trouve une petite exposition, en achetant un ticket d’entrée au guichet de la gare pour 1000 KRW.
Camp Bonifas
Le camp Bonifas, situé à proximité mais à l’extérieure de la DMZ, est la caserne qui abrite les hommes du bataillon de sécurité de la Joint Security Area.
Nous stationnons face à l’entrée du camp et deux militaires montent dans l’autocar pour confronter la liste des passagers avec nos passeports. Ils nous accompagneront tout au long de la visite de la JSA.
Arrivés au centre des visiteurs à l’intérieur du camp, on nous remet une liste de consignes à rendre signée. Puis nous assistons à la projection d’un film de quelques minutes à propos de la Guerre de Corée et de ses suites jusqu’à nos jours.
Nous délaissons ensuite l’autocar de Koridoor pour embarquer à bord d’un bus de l’armée en direction de la JSA.
Joint Security Area – JSA / Panmunjom
Le bus nous emmène à l’intérieur de la zone tampon et nous dépose à l’entrée de la House of Freedom. Le pavillon actuel a été construit en 1998 et il a accueilli en juin 2019 le sommet Corée du Nord – États-Unis.
Des militaires quittent au pas le bâtiment pour prendre position à l’extérieur. Nous les suivons quelques instants après.
Nous nous retrouvons alors face aux fameuses baraques bleues et au Panmungak nord-coréen qui reçoit lui aussi ses touristes (des Chinois, nous glisse-t-on). Nous sommes libres de prendre des photos en direction du Nord mais jamais vers le Sud, et le personnel y veille efficacement.
L’un des baraquements nous est ouvert. Il s’agit d’une salle équipée pour que les délégations officielles des deux Corée puissent se réunir, chacune entrant par la porte de son côté de la frontière. Techniquement, nous pouvons donc aller et venir entre les frères ennemis sur quelques mètres à l’intérieur de cette pièce.
La visite se poursuit à l’est, en passant devant l’arbre planté par Moon Jae-in et Kim Jong-un en commémoration du sommet inter-coréen d’avril 2018, jusqu’au pont de bois où ils se sont entretenus en privé autour d’une table à cette occasion.
Sur le chemin du retour vers le bus, nous passerons derrière la Pagode adjacente à la Freedom House, nous arrêterons à une plaque en l’honneur d’un soldat sud-coréen mort en 1984 sous les balles nord-coréennes en portant secours à un déserteur soviétique, puis devant le pavillon des réceptions Home of Peace.
Le bus nous raccompagne au camp Bonifas où nous découvrons un temple bouddhiste récemment édifié avant de prendre congé de nos accompagnateurs en treillis et remonter à bord de notre autocar civil.
Inter-Korean Transit Office
À l’entrée de l’autoroute (actuellement fermée) qui relie les deux pays à travers la DMZ, le bâtiment Inter-Korean Transit Office abrite les services de police et de douane auprès desquels les voyageurs doivent accomplir les formalités d’entrée ou de sortie du territoire sud-coréen.
Il est bientôt midi et donc l’heure de déjeuner. À l’étage, un restaurant. Au choix, pour ceux qui souhaitent manger : bibimbap végétarien pour 8000 KRW ou bulgogi (viande) pour 10000 KRW.
Third Infiltration Tunnel
La pause déjeuner de 45 minutes terminée, en route pour visiter le « troisième tunnel d’infiltration ». Découvert en 1978, il compte parmi les 4 tunnels creusés sous la frontière coréenne et mis au jour par le Sud. Le Nord aurait espéré marcher sur Séoul ainsi. Une vidéo de quelques minutes présente le sujet.
Il convient de déposer ses effets personnels, dont smartphones et appareils photos, dans des casiers individuels fermant à clé. Et de mettre un casque de protection sur la tête.
Pour accéder au tunnel situé 70 mètres sous terre dans la DMZ, il faut descendre une pente raide sur 350 mètres. Un parcours infaisable pour les personnes qui ne sont pas en bonne condition physique.
Le boyau visitable s’étend ensuite sur 265 mètres environ. C’est étroit – nous marchons en file indienne, et c’est bas de plafond – on se cogne la tête à la paroi supérieure à plusieurs reprises. Il fait frais et l’eau ruisselle sur la roche. Au bout, une barricade infranchissable : 170 mètres au-delà c’est la Corée du Nord.
Pour revenir à la surface, reste à remonter la pente raide. Même les plus sportifs se souviendront du moment.
Un petit musée est à visiter dans le bâtiment juste en face : histoire de la guerre, outils pour creuser les tunnels, armes d’époque, etc.
Observatoire de Dora
L’autocar nous emmène pour la dernière étape du parcours : l’observatoire de Dora.
À l’étage, une grande salle de théâtre avec vue sur la DMZ, les villages et la magnifique campagne alentour. Un écran vidéo et une maquette aident à identifier les lieux. Face à nous, le village de Daeseong-dong où se dresse un drapeau sud-coréen. Puis le village de Kijong-dong avec son drapeau nord-coréen encore plus haut. Et au loin, la zone industrielle de Kaesong en contrebas des montagnes.
Sur le toit, une terrasse panoramique avec des jumelles permet d’observer tout cela de plus près.
Il est déjà l’heure de rentrer à Séoul. Le trajet vers la capitale longe la rivière étroitement surveillée, avec ses barbelés et autres postes d’observation militaires. L’entrée dans l’immense zone urbaine détonne avec la verdure que nous venons de quitter. Nous serons de retour à l’agence Koridoor peu avant 16h00.
Irez-vous visiter la DMZ et la JSA à la frontière inter-coréenne lors d’un voyage à Séoul ?